Si la question de la parité homme-femme a pris une si grande importance dans le débat public en Afrique, cela n’est pas dû au hasard. Le fait est que dans les sociétés africaines, classées parmi les plus conservatrices, la question de l’égalité homme-femme est un sujet parfois sensible, qui continue de faire couler beaucoup d’encre et de salive.
POURQUOI LA QUESTION DE L’ÉGALITÉ HOMME-FEMME POSE-T-ELLE PROBLÈME ?
D’entrée de jeu, il faudrait signaler qu’en dépit des influences de l’intermède colonial, les peuples africains ont globalement conservé leurs structures traditionnelles marquées par la domination masculine. Moins touchées par le progressisme occidental enclin à la disparition des frontières homme-femme, les sociétés africaines ont pérennisé une certaine division sexuelle du travail et des privilèges sociaux, dont les manifestations restent encore vivaces et continuent de structurer les rapports, les rôles, les statuts et les perceptions entre les genres masculin et féminin.
Ainsi, en milieu rural africain, il n’est pas rare que les hommes soient généralement construits comme étant plus aptes à la pratique de travaux comme la chasse ou l’exercice du pouvoir politique ; tandis que les femmessont davantage affectées à l’accomplissement des tâches ménagères, même s’il existe de nombreuses sociétés où les femmes jouissent de statuts et de prérogatives « masculinisés ». Même dans les villes où la culture urbaine tend pourtant à se rapprocher des mœurs occidentales, les différences de traitement au niveau de l’accès à l’école, à l’emploi, à la politique, etc., entre les hommes et les femmes, sont généralement à l’avantage des premiers cités. Cela permet aux hommes d’accumuler des ressources de pouvoir qui leur octroient le statut d’acteurs dominants qu’ils sont prêts à conserver à tout prix.
D’ailleurs, il faudrait avoir à l’esprit que l’égalité homme-femme est un projet globalement irréalisable. En effet, tous les êtres humains (qu’ils s’agisse des hommes ou des femmes) possèdent des caractéristiques propres à chacun d’entre eux.
Or, toute différence entre deux personnes, aussi infime soit-elle, crée une différenciation, c’est-à-dire un traitement inégal dans la manière dont les autres les perçoivent et agissent avec elles.
CE QU’IL FAUT FAIRE POUR RÉDUIRE LES INÉGALITÉS HOMME-FEMME
Il est quasiment impossible d’abolir les inégalités homme-femme. Par contre, on peut les réduire. Pour ce faire, il faudrait identifier les ressources de pouvoir, favorisant la domination masculine (pouvoir politique, ressources financières, niveau d’éducation, emploi…) et en favoriser leur accès aux femmes. Cela passe nécessairement par la vulgarisation de l’équité dans tous les champs sociaux où les femmes sont dominées, en mettant en place des discriminations positives en leur faveur. A ce sujet, l’imposition des quotas de femmes dans les partis politiques, l’armée ou encore la construction d’écoles dédiées aux filles, etc., sont des mesures pertinentes à promouvoir.
Il est donc à retenir que la parité homme-femme se déploie comme un horizon lointain, dont on peut cependant se rapprocher, en mettant en œuvre des mécanismes équitables qui permettront aux femmes de prendre toute leur place dans la société.
Serge Gohou (sociologue, contributeur)