Dans La Baronne, amour, haine, vengeance, dépravation, infidélité et hypocrisie forment un cocktail explosif. « Il était difficile de croire, écrit l’auteur, que c’était le même homme qui rendait un culte à mes seins, délirant face à leur beauté (…) en présence de sa femme j’étais juste Thérèse, bonne à lui servir le thé ».
La trame du récit est semblable au temps, elle passe son chemin, sans jamais s’arrêter : rires, jubilations, extases, trahisons, échecs, regrets à en perdre la raison. Tout au long de ce roman, le narrateur arrive à capter les nuances de la fourberie masculine. Patricia Hourra met à nu ces prédateurs qui savent profiter des faveurs des femmes vivant dans la précarité.
Dans ce récit sans concession, les femmes elles-mêmes ne sont pas épargnées. Certaines sont prêtes à faire fi de leur principe de bonne moralité pour satisfaire les fantasmes de leurs compagnons.
« Il a tenu à ce qu’elle lui trouve une jouvencelle. C’était son fantasme ! Une jeune fille qu’elle a ramenée de son village, pour prendre soin de Philippe. Il couchait avec elle dès qu’elle partait de la maison…Elle le savait et cela donnait du piment à leur relation ».
L’auteur fustige en outre l’interruption volontaire de grossesse. « Il introduisit la canule en moi – quand je revins de ce monde, je vis l’infirmière in extremis emporter un ustensile qui comportait sans aucun doute ce caillot de sang, ces débris humains, qui à mon endroit ne prononceraient jamais le mot « maman ».
Dans La Baronne, Patricia Hourra passe au peigne fin la condition de la femme africaine, dénonçant ce qui mine son épanouissement dans nos sociétés toujours aussi phallocrates.
Elle met aussi à nu une vérité cachée et pourtant connue de tous : c’est au sein de la gent féminine que se trouvent les plus farouches défenseurs du règne des mâles dominants.
Avec ce roman, Patricia Hourra confirme avec maestria qu’elle occupe une place singulière dans la littérature ivoirienne et même africaine. C’est une plume prometteuse, avec laquelle il faut désormais compter.
Patricia HOURRA est juriste de formation. Passionnée de lettres, elle fait une entrée remarquée sur la scène littéraire ivoirienne avec CHRISTELLE OU LE DESTIN D’UNE ESCLAVE SEXUELLE. Elle signe son retour avec LA BARONNE, un roman puissant qui force le respect et l’admiration.
Isabelle Kassi Fofana (directrice générale de Massaya Editions)
LA BARONNE Patricia Hourra, 180 p. Les Editions Continents.