C’est un véritable gâchis de talents et de compétences (des femmes). Leur présence, de plus en plus importante à l’école, ne se traduit pas véritablement en progrès dans le monde du travail. Abandonnées socialement, elles sont surreprésentées dans le secteur informel. Sous la pluie et le soleil, ces african women triment pour préserver leur dignité.
Les résultats de leurs efforts – individuels ou collectifs – sont perceptibles dans les assiettes, et à travers l’éducation des enfants.
Une nouvelle génération a pris le relais, pour faire bouger le continent. Quoique bonnes élèves, les compétences professionnelles de cette poignée de femmes sont bien trop souvent silencieuses. Encore jeunes pour se conformer aux exigences du management, elles doivent prouver qu’elles sont à la hauteur. À l’embauche ou pour l’obtention d’une promotion, que n’a-t-on pas entendu et vu à ce sujet ? Les ragots de bas étage, pour expliquer les acquis d’une dame. Les non-dits, en eux-mêmes, sont plus pernicieux que les préjugés.
Pour ne pas les embaucher (ou promouvoir), des employeurs évoquent, très souvent, les questions liées à ce qui colle à la femme : enfant, fête, etc. Avoir accès à des postes de responsabilité relève d’une autre alchimie. Leurs absences excessives représenteraient une perte pour l’entreprise.
Serait-il possible de changer les codes ? Pour l’heure, il n’y a pas de politique véritable d’incitation à la mixité et à la diversité. Faut-il avoir recours à la loi pour faire bouger – au moins – les lignes ? Les avis sont partagés : la loi pourrait s’avérer-elle-même- très inégalitaire. Néanmoins, si elle devait voir le jour, la loi aurait le mérite de sensibiliser à large échelle sur le sujet de la mixité et du leadership (féminin) au sein des entreprises.
Alors, qu’attend-on de la femme africaine ?
CROIRE
La quasi-inexistence de fonds de financement (ou de crédit bancaire), la rareté de l’emploi, le manque de contrats formels, les licenciements abusifs et les salaires de paille, qui gangrènent le secteur privé africain, ne facilitent pas les choses. À l’image de la fonction publique, tout est une question de « bras long » et de « des-sous ». Autrement, il faut attendre que la roue tourne. La chance aussi.
Les difficultés rencontrées, çà et là, ont donné libre cours à des légèretés, et parfois à des excès. Des femmes utilisent leur atout – physique - pour se faire une place au soleil. Les plus compétentes ne sont pas à exclure de la liste noire. Ce petit truc, pour marquer la différence et avoir une longueur d’avance, surtout quand elles jouissent d’une plastique de rêve. « Ici, comme ailleurs, la compétition est déjà biaisée... », prétextent certaines. D’autres ont fait le choix de la probité et de l’excellence. Hélas, rien n’est fait pour encourager conséquemment les vierges de l’emploi ! La religion reste généralement le dernier recours.
Au quotidien, les femmes sont influencées par ce qu’elles voient et entendent. Les médias ne contribuent pas assez à valoriser des modèles féminins. Se pose donc la problématique de ce en quoi croient les femmes africaines.
Il ne reste plus qu’aux parties prenantes, de la société, d’accorder leurs violons sur les compétences réelles de la femme, à elle exigées.
ÊTRE COMPÉTENTE
Se pose déjà la question de l’adéquation entre la formation et l’emploi. Ce n’est pas seulement une affaire de femme. Viennent ensuite les clichés sur le type de métier. A priori, il serait étonnant de voir des femmes en action dans des secteurs d’activité (ou à des postes) traditionnellement chasse gardée des hommes.
La mixité des postes aurait un effet positif sur l’environnement professionnel. Elle réduirait l’absentéisme, le nombre d’accident au travail et le turnover, selon des spécialistes du genre. Lorsqu’une femme tient les rênes d’une entreprise, les performances sont meilleures. Et, plus il y a de femmes, mieux se porte l’organisation. Parce que les femmes répondent positivement à des critères comme l’innovation, la coordination, l’ouverture vers l’extérieur et le leadership. Et pourtant, lorsqu’une femme réussit, à tirer son épingle du jeu, il y a toujours cette petite phrase au bout des lèvres : Qui est derrière elle ? Les femmes qui travaillent sous les ordres d’une autre seraient plus angoissées que celles qui travaillent pour un homme. Pour ces raisons, et pour d’autres, la carrière de nombreuses d’entre elles a été freinée, à tort ou à raison. C’est un problème social de fond. Et pour cause, l’archétype de la femme (africaine) se dégrade du fait de son influence par l’Occident. La traditionnelle : émotive, sensuelle, belle, bonne cuisinière, idéale pour s’occuper des enfants et de l’homme... mais peu (ou pas du tout) instruite. La moderne : fêtarde, paresseuse, aime la facilité... mais plus instruite. Au-delà de nier ces évidences, sont-elles (la nouvelle génération) capables d’allier leur responsabilité personnelle à leur engagement professionnel ?
OSER
C’est à ce niveau que tout se décide. Il faut du cran pour prétendre à un meilleur statut. La femme africaine, employée ou patronne, doit être à mesure de se dupliquer, sur plusieurs tableaux. Une sorte d’agent professionnel, opérationnel 24h sur 24 et capable d’aller au charbon. Ensuite, il faut se surpasser pour rester une bonne femme de foyer...
Les perceptions que la société a de ce qu’elles sont (ou de ce qu’elles peuvent) en entreprise (dans les affaires), perturbent encore les femmes. Leur propre regard est truqué. Il leur faut encore du temps pour se débarrasser des pesanteurs culturelles de la société africaine. Chacun(e) doit donc être vigilant(e) aux stéréotypes qui sont véhiculés sans que l’on le veuille. C’est bien plus une question de mentalité que de moyens.
Le leadership des femmes africaines implique donc une mise en place de stratégie incitative et participative, pour davantage leur ouvrir les voies du possible. L’enjeu est de taille : équilibrer les embauches ; faciliter la progression des parcours ; féminiser le top management ; égaliser les salaires... Les entreprises africaines ont tout à gagner de ce pari. Le continent aussi.
La rédaction