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Dosso Tiekoumba ou comment surmonter les regards pour vivre son art

Dosso Tiékoumba est un acteur-comédien ivoirien, reconnu pour ses rôles marquants dans des séries comme Ma Famille et Les Invisibles, où il a captivé le public avec son jeu authentique.

il y a 4 mois

Une enfance entre village et ville, le terreau de sa passion pour l’art

Dosso Tiékoumba grandit entre deux mondes. Il passe une partie de son enfance à Dianfé, un village situé dans le département de Séguéla. Puis il découvre la vie urbaine à Séguéla.

Dès l’école primaire, il est initié au théâtre scolaire par ses institutrices, mesdames Boa et Timothée Georges. « Ce sont ces deux dames qui nous ont inculqué l’amour du théâtre. Mme Timothée Georges était comme une avant-gardiste, l’interface entre les parents et l’école pour nous permettre de pouvoir aller aux répétitions », confie Dosso Tiékoumba.

Ces deux enseignantes auront été la pièce motrice de son engagement artistique.

Des premiers pas au sein de troupes de théâtre

Plus tard, le jeune Dosso rejoint la capitale économique pour poursuivre ses études. À Abidjan dans les années 1980, il fait la rencontre de Fomba Salia, fondateur d’une troupe de théâtre à Abobo. « J’ai intégré la troupe de M. Fomba. On a travaillé et après, je me suis retrouvé dans la troupe Les Experts d’Abidjan sous la direction de Séry Albert », poursuit l’acteur ivoirien.

Dans cette troupe, il se lie d’amitié avec Omega David, Decothey et Adama Dahico, trois figures emblématiques du théâtre ivoirien, dont les échanges créatifs enrichiront son parcours artistique.

« Dans la troupe de Séry Albert, il y avait un petit groupe appelé Les Créateurs du rire dont les membres se retrouvaient pour faire des sketchs humoristiques dans les écoles en dehors des pièces classiques. Un jour, j’ai demandé à intégrer. J’ai été accepté », se souvient Dosso.

Ce groupe sera plus tard rebaptisé Les Rigolos d’Abobo par la regrettée Rose Marie Guiraud.

Des préjugés aux premières reconnaissances

Embrasser une carrière de comédien était mal perçu par la société. Le théâtre était souvent assimilé à un domaine sans avenir, réservé aux marginaux, reconnait le comédien ivoirien.

« À l’époque, l’art était le parent pauvre de tous les métiers. Nos parents pensaient que c’est après avoir échoué à l’école qu’un enfant embrasse ce métier. Nous étions vus comme des rebelles, des bons à rien, des renégats », soutient Dosso. Pour lui, cela est dû à la méconnaissance de l’art et les préjugés.

Malgré les préjugés sociaux qui fustigeaient l’art comme une voie sans avenir, Dosso Tiékoumba persiste, convaincu que sa passion finira par s’imposer. Ses efforts sont récompensés lorsqu’il attire l’attention de Michel Koffi-Djémé, réalisateur du film La révoltée, ce dernier lui offre un rôle aux côtés d’Oméga David et Adama Dahico. Ce projet marque un tournant décisif dans sa carrière.

Du théâtre au cinéma

Convaincu que « le cinéma est l’enfant du théâtre », Dosso voit dans son expérience théâtrale le fondement d’un jeu cinématographique riche et naturel. Cette approche lui permet de se démarquer dans les productions cinématographiques.

« Le théâtre nous a permis d’être de bons acteurs parce que nous avions déjà toutes les bases », avoue-t-il.

L’acteur ne manque pas de souligner la différence de jeu entre les acteurs formés au théâtre et ceux issus uniquement du cinéma, mettant en avant le naturel des premiers.

Dosso Tiékoumba a bien voulu nous révéler sa manière particulière de se préparer pour un rôle au cinéma. « Je fais la lecture du scénario pour comprendre la psychologie de mon personnage. Est-il colérique, doux, introverti ? », révèle-t-il. Cette analyse lui permet d’incarner ses personnages avec justesse.

L’aventure « Ma famille »

C’est lors d’un tournage sur la scolarisation des filles dans le nord de la Côte d’Ivoire qu’Akissi Delta, réalisatrice et productrice de la série « Ma Famille », remarque son talent.

Impressionnée, elle lui propose de rejoindre son prochain projet. « Elle m’a dit d’attendre son appel, qu’elle avait un rôle pour moi », rappelle l’acteur. Quelques temps plus tard, il intègre la célèbre série qui le propulse sous le feu des projecteurs.

Dans le rôle de l’époux de Gbazé Thérèse, Dosso incarne à la perfection un personnage complexe, alliant émotion et complicité, avec cette actrice talentueuse et expérimentée.

« Gbazé Thérèse est aussi le fruit du théâtre. Elle est comédienne. Quand deux comédiens expérimentés se retrouvent, une sympathie nait. Il n’y a pas de barrière. Je connais la façon de jouer de Gbazé Thérèse. Elle aussi me connait. Je connais sa spontanéité, sa capacité à répondre et à s’adapter. On s’est approprié nos différents personnages. »

Son conseil aux jeunes acteurs : l’humilité, l’une des valeurs clé qui l’ont guidé tout au long de sa carrière. « Le respect des ainés et des devanciers est essentiel, non pour leur courber l’échine, mais pour apprendre et grandir à leurs côtés », suggère l’enfant de Dianfé.

L’histoire de Dosso Tiékoumba est celle d’un homme qui, malgré les obstacles et les préjugés, a su faire de sa passion un véritable moteur de réussite. Son parcours exemplaire démontre qu’avec la persévérance, l’amour du métier et la détermination, il est possible de gravir les échelons et de s’imposer comme une icône.

Richard Konan