Ils sont ainsi près de deux milliards de musulmans à travers le monde à déferler chaque vendredi sur les lieux de prière, les cœurs enveloppés par l’extase de la communion intime avec la divinité, les regards absorbés et les faces prosternées vers l’Unique Horloger et Maître du multivers, ALLAH. Vendredi, jour de ferveur spirituelle et fraternelle, jour de fête et de réjouissance, jour d’exhortation inspirationnelle.
Tout y est dans un bloc savant et harmonieux où le sacré, le juridique, le jurisprudentiel, le spirituel et le sublime s’entremêlent, où le folklore et les brouhahas n’ont en principe et dans le principe aucun droit de citée. Fondre la petitesse du serviteur dans le vaste horizon de la Ouma (communauté), non pour le noyer, mais pour le fortifier dans l’immense fleuve de la communion collective. Un jour de prière comme tout autre, mais un jour particulier.
LA FORCE DE LA REVELATION
Sur base des textes scripturaires, la prière du vendredi revêt un caractère exceptionnel en Islam. Cette dimension reste imputable au vendredi lui-même du fait de la sacralité que lui confère la révélation qui creuse le nid de sa démarcation avec les autres jours. « Ô vous qui avez cru ! Quand on appelle à la Salāt (prière) du jour du vendredi, accourez à l’invocation d’Allah et laissez tout négoce. » S 62 V 9. Le vendredi est pour le musulman, ce que le samedi représente pour le juif et le dimanche pour le chrétien. Mieux, au-delà de l’aspect cultuel collectif, il est perçu comme un joyau et un présent divin. Une porte glorieuse d’accès au grenier fécond de la Miséricorde inouïe du Détenteur de toute Majesté Suprême, ALLAH.
Le Messager d’ALLAH, Mouhammad saw a dit : « Certes, le vendredi est le meilleur des jours, le plus important auprès d’ALLAH. Il est même plus important que le jour du sacrifice et le jour de la rupture du Ramadan. Cinq choses s’y sont déroulées : Allah y a créé Adam, y a fait son âme, y a placé une heure pendant laquelle Il ne refuse rien au fidèle qui Le sollicite, à moins qu’il ne s’agisse d’un interdit, l’heure de la fin du monde y sonnera et il n’y a ni Ange rapproché, ni ciel, ni terre, ni montagne, ni mer qui ne redoute le vendredi » L’authenticité de cet enseignement prophétique est attestée par le Savant émérite Albani.
En termes de degré et de valeur, la prière de vendredi demeure de loin, la plus importante et constitue une opportunité de rappel pour vivifier la foi du musulman, pour consolider le tissu de fraternité entre les membres de la communauté et susciter en eux, l’élan de fraternité et de solidarité agissante. Elle offre à l’Imam, l’occasion de dénoncer les tares de la société, de garder une hauteur d’esprit par rapports aux prises de positions biaisées par des appartenances à des obédiences et courants politiques. Elle est un rendez-vous de socialisation de l’individu à travers le contact avec les autres membres du corpus communautaire pour toucher du doigt leurs peines, leurs préoccupations, leurs soucis, leurs problèmes examinés à la lumière des canons des principes juridico-religieux.
Hormis la dimension spirituelle qui lui est inhérente, le vendredi est considéré comme un jour de réjouissance et de fête, à l’instar des deux fêtes agréées en Islam qui sont l’Aïd-el Fitr (la fête de Ramadan) et l’Aïd-el Ad’ha (la fête de Tabaski). Dans un hadith rapporté par Abu Horayra, le Messager saw a dit : « Le jour du vendredi est un jour de fête. Ne faites donc pas de votre jour de fête un jour de jeûne, sauf si vous jeûnez également le jour précédent ou le jour suivant ». Il a dit également : « Ce jour est un jour de fête que DIEU a établi pour les musulmans. Celui qui va à la prière de vendredi, qu’il fasse ses grandes ablutions, s’il possède du parfum, qu’il en mette et je vous commande le siwâk (un cure-dent qui était le moyen de se curer les dents pour avoir une haleine agréable). » Les savants ajoutent toutefois que pour la femme, la discrétion est de mise au niveau des senteurs pour ne pas attirer les regards impudiques des hommes. Pour ceux qui font des travaux salissants, le Messager d’ALLAH saw a préconisé d’avoir des habits de rechange afin d’être présentables et beaux le jour du vendredi.
UN RENDEZ-VOUS D’EXTASE INEDITE
Véritable fontaine de jouvence spirituelle, la prière du vendredi offre au croyant, l’opportunité d’un ressourcement spirituel avéré et d’une communion intime avec la divinité.
C’est la marche glorieuse de l’escalier qui le guide de manière hebdomadaire au sommet de l’extase spirituelle.
Elle lui permet de faire sa provision pour la semaine, comme le jeûne du Ramadan lui permet de faire sa provision annuelle. Certains pays musulmans ont fait du vendredi un jour de repos, pour permettre aux fidèles de jouir à profusion de ses mérites incommensurables. Les enseignements prophétiques sont éloquents en la matière.
En effet, dans un hadith mis en évidence par Bukhari et Muslim, deux grands rapporteurs des faits, des gestes et des dires authentiques du Messager d’ALLAH saw, il est mentionné que : « le jour du vendredi, les Anges prennent place aux portes de la Mosquée et notent dans l’ordre des arrivants. Quiconque se lave le vendredi comme il le fait pour la janaba (grande ablution) et se rend à la Mosquée à la première heure, fait une bonne œuvre de la valeur d’une offrande d’un beau chameau. S’il se rend à la deuxième heure, il aurait la valeur d’une vache offerte, à la troisième heure, un bélier, à la quatrième une poule et à la cinquième, un œuf. Lorsque l’Imam se présente et monte en chaire, les Anges rangent leurs registres et écoutent le rappel. »
La présence des Anges et le sermon de l’Imam qui ouvre une bonne parenthèse de glorification du SEIGNEUR, imposent au fidèle d’observer une discipline et un silence absolu à l’intérieur de la Mosquée et pendant le sermon. Une fois l’Imam établi dans sa chaire, le fidèle devra s’interdire du moindre geste ou du moindre propos à même d’importuner autrui. Les invocations sont en ce moment interdites, les salutations également, de même que les quêtes et les appels téléphoniques ou tout autre propos ou geste qui seraient de nature à troubler l’ordre. En la matière, le Messager d’ALLAH saw faisait cette mise en garde : « Si vous dites à votre voisin : « taisez-vous » au moment où l’imam est en train de prononcer le prêche du vendredi, vous aurez proféré une vaine parole ». Echanger avec autrui pendant le sermon de l’Imam, téléphoner, saluer son voisin, enjamber les fidèles pour se frayer une place, faire des dons ou des quêtes financières à un moment où les Anges délégués par le SEIGNEUR ont fermé leurs registres et suivent attentivement le sermon, cela dénote d’une ignorance coupable ou d’un mépris des enseignements coraniques et prophétiques.
A l’intérieur de la Mosquée, le musulman est plongé dans une atmosphère de gaieté qui lui procure de la quiétude et la sécurité. Et même sur le plan mystique, le diable et ses suppôts n’ont point accès à la Mosquée.
Lorsque ceux-ci possèdent l’âme ou le corps d’un individu, ils ressortent de lui dès l’instant où il veut affranchir le seuil de la Mosquée. Tout comme le mois du Ramadan qui contient un seul jour meilleur que tous les jours du Ramadan où toutes les prières pieuses sont acceptées, (la nuit de la destinée), il existe une période, également le vendredi, où le SEIGNEUR agrée toutes les prières qui lui sont adressées.
En effet, selon Abou Hourayra, Raa, le Messager d’ALLAH saw a mentionné le vendredi en disant : « Il est en ce jour un moment au cours duquel tout serviteur musulman se tenant en prière et demandant quelque chose à DIEU sera exaucé. »
Certains savants situent ce moment entre l’établissement de l’Imam sur sa chaire jusqu’à la prière, d’autres soutiennent que c’est juste après la prière de Asr (celle de la fin de l’après-midi).
C’est pour permettre au fidèle de bénéficier du mérite de ces jours qu’il est invité à ouvrir son cœur, à faire preuve de largesse et à persévérer dans les œuvres de bienfaisance le vendredi. Au nombre des œuvres méritoires, en dehors des aumônes à l’endroit des pauvres et non des mendiants qui prennent les d’assaut Mosquées, la mendicité étant interdite en Islam, il existe aussi des œuvres spirituelles qui lui apportent faveurs et mérites. Il s’agit entre autres de la prière sur le Noble Messager saw et la lecture du chapitre 18 du Saint Coran dans la langue de révélation. L’Envoyer d’ALLAH swa a dit : « Quiconque récite la sourate Al-Kahf (18) le jour du vendredi, ALLAH l’éclaire entre les deux vendredis », rapporté par An-Nassaï.
Non seulement le vendredi est une opportunité d’expiation de péchés ; « les cinq prières et la prière du vendredi expient les fautes commises entre deux vendredis, pourvu qu’on évite les péchés majeurs », mais du point de vue eschatologique, « Allah protège contre l’épreuve de la tombe tout musulman qui meurt dans la journée ou la nuit du vendredi » comme l’a indiqué le Messager d’ALLAH dans un hadith rapporté par At-Tirmidhi.
On le voit clairement, la prière du vendredi est une mine de diamant à perte de vue. Ses mérites sont indéchiffrables et elle constitue pour le musulman, une opportunité de renaissance, de régénérescence, de réjouissance et d’élévation spirituelle. La prière du vendredi lui offre le loisir de réactualiser de manière hebdomadaire, son pacte de soumission et de communion avec la divinité, de faire un avec l’UN.
Il y a dans le vendredi, une bonne portion de l’âme de la prière du musulman. Le sevrer de ce rendez-vous d’intimité, c’est lui arracher une tranche du bonheur, une racine profonde de sa spiritualité. Même dans un pays dit laïc, cela ne devrait nullement être d’actualité dans la mesure où cette prière est la source de son inspiration, de son esprit de créativité et de sa motivation. D’ailleurs, la liberté de pensée et de religion est un droit inviolable.
A tout égard et dans tout domaine professionnel, l’on doit lui garantir cette part de ressourcement spirituel qui ne prend que moins d’une heure et qui dans le fond, ne fera que profiter à tous. L’en sevrer est une source de frustration et le dispose à agir dans l’amertume et la rancœur, en le confinant dans la médiocrité et la contre productivité.
L’éloignement de la prière du vendredi obscurci l’âme et le cœur, conformément aux enseignements prophétiques : « Que les gens ne laissent jamais la prière de vendredi, sinon, ALLAH mettra un sceau sur leurs cœurs, puis ils seront inscrits parmi les distraits ».
El Hadj Diabaté Fousséni, journaliste-écrivain